À l’occasion de la rentrée 2014, Susan Finding et Moustafa Traoré ont répondu aux questions du journal Atlantico à propos du système éducatif au Royaume-Uni.

http://www.atlantico.fr/decryptage/classes-70-eleves-cour-recre-toits-ou-scolarisation-1h30-chez-soi-quand-poids-immigration-invite-dans-rentree-britannique-susan-1734634.html#5eSuDWEQkFGCBbPs.99

 

4 septembre 2014

 

CLASSES À 70 ÉLÈVES, COUR DE RÉCRÉ SUR LES TOITS OU SCOLARISATION À 1H30 DE CHEZ SOI… QUAND LE POIDS DE L’IMMIGRATION S’INVITE DANS LA RENTRÉE BRITANNIQUE

Sous haute tension démographique, le système éducatif du Royaume-Uni connaît des ratés. Des écoles primaires ont ainsi refusé des milliers d’enfants, faute de place. Le DailyMail souligne le rôle de l’immigration dans cet engorgement des classes.

Atlantico : Des classes de 70 élèves, une cour de récréation improvisée sur les toits ou la nécéssité de faire 3h de route quotidiennement… Voici le bilan accablant de la rentrée scolaire au Royaume-Uni dressé par le DailyMail. Dans un système éducatif britannique sous haute tension démographique, de nombreuses écoles primaires dans les zones urbaines du pays ont été obligées de refuser des milliers d’enfants, faute de place. Cette année, 1 élève sur 8, soit plus de 76 000 d’entre-eux, se sont vus refuser leur premier choix d’école, tandis que 22 500 n’ont obtenu aucun de leur choix. Le quotidien conservateur souligne le rôle prépondérant de la hausse de l’immigration récente dans l’engorgement des classes. Confirmez-vous ce lien de cause à effet et son importance ?

Moustafa Traoré : Si l’immigration joue bel et bien un rôle, elle n’est pas le seul facteur en jeu. La principale explication est liée aux femmes nées dans les années 60 et au début des années 70, qui ont eu des enfants très tardivement. Or, ce boom n’a pas été prévu par les gouvernements successifs, qui pour combler le déficit démographique, ont depuis ouvert les portes de l’immigration. Il est d’ailleurs à noter que cette immigration est avant tout blanche et européenne, notamment issue des pays de l’Est comme la Pologne et la Roumanie, et donc incontrôlable du fait de l’appartenance du Royaume-Uni à l’Union européenne. C’est d’ailleurs celle-ci qui pourrait poser problème, et non l’immigration indo-pakistanaise, qui est contrôlée. On peut mieux comprendre dès lors le débat qui agite le pays sur son appartenance à l’UE. Il est ainsi tout à fait possible, que derrière cette question posée aujourd’hui par les politiques et les médias sur l’école, se pose en partie celle de l’immigration européenne. Aujourd’hui, il y a en tout cas un manque cruel d’établissements scolaires et de professeurs pour répondre à la demande.

 

Susan Finding : Tous les journaux ne font pas la même analyse que le DailyMail. Même s’ils reconnaissent le rôle d’une démographie croissante qui n’a pas été anticipée, ils insistent sur les problèmes de concentration géographique de ces populations dans les villes et sur l’absence de planification dans la construction des logements et des places scolaires, qui n’a pas été pensée et intégrée dans la construction des quartiers.

 

Le lien n’est donc pas total : il y a un manque d’anticipation notoire des pouvoirs publics, à la fois à l’échelon national et local, car le système éducatif britannique est largement décentralisé n’est pas géré au niveau national mais au niveau des territoires. Le risque d’engorgement était d’ailleurs connu. Depuis 4 ans, de nombreuses municipalités débordées ont ainsi tiré la sonnette d’alarme, alertant le gouvernement sur le manque de places dans leurs écoles. Le Premier ministre conservateur, David Cameron, a d’ailleurs pris conscience du problème et autorisé des rallonges budgétaires malgré le contexte d’austérité.